SOMBRE PRÉSAGE

Bon, le vieux avait, contre toute attente, répondu à la question osée de la guerrière. Et de manière exhaustive qui plus est. C'était une chose. Mais Reyan était plutôt mitigé quant à la réponse. Les pièges et les énigmes, il en faisait son affaire. Les sortilèges et les enchantements passaient encore, surtout avec le nombre de magiciens que comptait la bande. Par contre, il n'était pas très fan des bestioles. On ne savait jamais sur laquelle on allait tomber et leur comportement était, en général assez sauvage et aléatoire. Il posa le regard sur la guerrière. En cas d'attaque de bestioles, il veillerait à ne pas être trop loin d'elle et de son épée.

Puis ses yeux se posèrent sur la petite porte en bois désignée par le vieil homme. Une petite voix dans son esprit lui fit remarquer qu'il l'avait bien aperçu lors de son étude des lieux mais il n'en avait alors pas vraiment tenu compte, obnubilé qu'il était par le vieux fou, ses remarques cinglantes et son dédain. Il se morigéna une dernière fois pour son attitude très peu professionnelle et reporta son attention sur Nathanaëlle.
La guerrière semblait vouloir prendre les choses en main. Tant mieux. Trop habitué à travailler en solo, il n'était pas fait pour être chef de bande et la jeune femme semblait se plaire dans ce rôle tandis que les trois autres étaient bien trop passifs pour prendre la tête de leur petit groupe. Dans ces conditions, autant laisser faire Nathanaëlle pour le moment.

Il la laissa répartir les tâches et les positions, appréciant au passage les capacités d'analyse de la jeune elfe qui semblait avoir cerné les profils de leurs compagnons de quête. Il attendait cependant, avec grand intérêt, de connaître le rôle qu'elle lui attribuerait.

- ... Je pense que ta place est à l'avant, en éclaireur. Je ne doute pas que tu saches lire une carte, et ton aptitude à te déplacer sans bruit et déverrouiller les portes nous sera fort utile.Dit-elle alors en lui tendant la carte du Vieux Barjow.

Le roublard s'en saisit avec un sourire en coin avant d'esquisser une légère révérence devant la guerrière. C'était sa manière de la féliciter pour le coup qu'elle venait de jouer.
En le plaçant en tête du petit groupe, elle s'assurait ses services et exploitait ses capacités au mieux tout en veillant à ce qu'il ne prenne pas la poudre d'escampette et faisait de lui, par la même occasion, un bouclier pour elle même et les lignes suivantes. C'était exactement ce qu'il aurait fait et il s'inclinait de bonne grâce devant l'esprit tactique de la jeune femme. Maintenant, c'était à lui de jouer. Pour sa survie, celle du groupe et, peut-être un peu quand même, pour l'avenir de la Cité.

Tenant la carte d'une main, il saisit de l'autre l'une des torches qu'il avait récupéré dans le couloir précédent, l'alluma à la flamme d'une des nombreuses bougies dispersées dans la pièce et s'approcha de la porte.
A part des rangées de livres serrés de chaque côté du couloir, il ne voyait pas grand chose mais il lui semblait peu probable que le danger leur saute dessus aussi vite. Il fit un pas, tenant sa torche devant lui, aussi éloigne que possible des rayonnages, puis se retourna.

- Eh bien allons-y ! Lança-t-il d'une voix claire où perçait un soupçon d'excitation.

Et il s'engagea d'un pas ferme dans le couloir, laissant le soin aux autres de le suivre, dans l'ordre indiqué par Nathanaëlle.

La discussion étant menée par Nathanaëlle et Reyan, Donovan se concentrait sur les paroles de l'ancien. De ce qu'il avait compris il fallait lui chercher un grimoire et que ça allait être dangereux. Il commença donc à penser à ses sorts, ce qu'il pouvait faire pour se défendre lui ou ses compagnons si nécessaire. Même s'il était certain qu'ielles étaient bien plus forts que lui. Voyant que tout le monde s'agitait, quelque chose se passait. Il reporta son attention sur ce qui se passait comprit qu'ils allaient chercher ce fameux bouquin. Nathanaëlle, lui indique clairement qu'elle n'a pas confiance en ses pouvoirs et qu'elle le place entre deux personnes pour le protéger. Il n'est pas vexé mais est désolé pour le pauvre Anarion qui doit le surveiller. Il regarde Anarion et lui fait un sourire d'excuse. Sachant quel est le problème principal qu'il pourrait causer, il décide d'appeler le louveteau têtu. Une fois l'animal apparu, Donovan s'agenouilla et lui expliqua qu'il ne devait pas lui désobéir. Lui et les autres allaient faire quelque chose de dangereux et qu'il ne doit venir que si Donovan l'appelle. Puis il ordonna au louveteau de disparaitre.

Puis Il rejoint la file indienne en adressant au vieillard un sourire. Voyant l'obscurité de l'endroit seulement éclairé par la torche du roublard, Donovan décide de créer une boule de feu pour qu'il puisse voir où mettre les pieds. Il se retourna vers Anarion :

- Je suis désolé que vous soyez bloqué avec moi, je vais faire mon possible pour ne pas être un poids. S'excusa-t-il d'un sourire de politesse.

Lancer de dé pour savoir si Eldurulfur va suivre les ordres de Donovan ( Dressage)

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A peine avait-il eu le temps de finir sa phrase que le louveteau était réapparu, il passait entre les jambes du mages de feu qui avait compris que, visiblement, l'animal ne comptait pas l'écouter. Il faisait attention à ne pas marcher sur la boule de feu sans ralentir le convoi pour autant. Le louveteau passait entre les jambes du mage et commença à accélérer, il passa entre les jambes des membres de l'équipe. Donovan avait peur qu'il ne se fasse marcher dessus ou qu'il ne fasse trébucher quelqu'un. Le louveteau disparut et réapparu à la tête du groupe trop content de découvrir cette nouvelle aventure. Le mage avançait doucement en faisant attention à où-est ce qu'il marchait à cause de l'obscurité. Il ne savait pas à quoi s'attendre au bout de ce périple. Mais il commençait à en avoir marre de ce louveteau désobéissant.
Il se disait qu'il allait devoir le dresser de manière plus intensive à l'avenir car il ne supportait plus que l'animal ne l'écoutait pas. Il continua d'avancer en espérant qu'Eldurulfur reste sage ou qu'il ne disparaisse temporairement.

Alors que le groupe avançait, il ne souhaitait pas rencontrer d'ennemis, non pas par peur mais plutôt par envie de tranquillité, c'était assez pénible de chercher un bouquin pour un ancien, il n'y avait vraiment pas besoin d'y rajouter des monstres ou autres obstacles.

Mais connaissant sa chance, il se dit que des obstacles étaient sûrement inévitables et il commença à réciter dans sa tête, une liste de sortilèges de feu qui pourraient leur servir.

Le vieillard avait-il mêlé à ses paroles quelque enchantement ? C'était une hypothèse qu'Arthémise n'aurait pas réfutée. Au seul mot de "vampire", elle s'était stupéfiée. Ses vieux réflexes, associés à la méfiance et à l'inquiétude qui la taraudaient, l'avaient laissée s'imaginer soudainement en proie à l'agressivité des autres face à ce qu'elle était.
Elle n'avait pas bougé un cil, et seule son immobilité aurait pu trahir son agitation et sa terreur intérieure. Son regard s'était figé sur le vieillard, lac de sang dont rien ne venait troubler l'insoutenable immobilité.

Une pulsion soudaine s'empara d'elle. En un battement de cils, elle pouvait s'emparer de l'ancêtre, le projeter au sol jusqu'à ce qu'un seul souffle ne le sépare de la mort, un seul souffle qui suffirait pour qu'il souffle son dernier mot, celui qui éclairerait enfin le mystère qui planait et la petite troupe. Un seul souffle qui la protégerait des velléités de chacun, puisque le pouvoir qui semblait implicitement être disputé entre eux tous, ce serait elle qui le détiendrait, la vie de ce vieillards entre les mains.

Son sang de vampire chanta en elle, exaltant son âme. Enfin ! Enfin la petite fille se réveillait, laissait place à la femme guerrière qu'elle avait refusé d'être... Le chemin avait été long, mais par moments, enfin, elle devenait réellement un vampire.

Un vampire...

Un seul souffle...

Un battement de cils.

Elle battit des cils, et prit la mesure de la pièce en un instant, attentive au discours du vieillard tandis qu'elle recouvrait la raison. Si ce qu'il disait ne l'effrayait pas, sa plus grand crainte venait d'elle-même. Sa nature leur serait-elle un atout ou devrait-elle encore se battre contre elle-même ? En son for intérieur, elle se promit que plus jamais elle ne se laisserait dépasser par ces peurs qu'elle avait pourtant enfin surmonté. Mais cette promesse, seul l'avenir la lui confirmerait. Alors sans un mot, elle rejoignit Nathanaëlle, pensive, ne laissant pas son visage trahir sa pensée. La semi-elfe avait raison ; leur confiance et la mutuelle connaissance qu'elles avaient des forces et des faiblesses de l'autre leur permettraient d'être un duo solide.

Malheureusement pour Donovan, le louveteau semblait bien décidé à n'en faire qu'à sa tête.
Alors que, un par un, dans l'ordre indiqué par Nathanaëlle, ils s'engageaient dans l'étroit couloir sombre, à la suite de Reyan, le jeune animal, sûrement excité par l'aventure, s'amusait à passer entre les jambes de son maître puis entre celles des autres. Lorsque enfin il se calma, ce fut pour partir en avant, tel un explorateur dans les ténèbres.

Heureusement pour son maître, le louveteau n'alla pas loin.
En effet, à quelques mètres devant eux, le couloir semblait s'arrêter net sur un mur lisse mais, une fois que le petit groupe aurait pris le temps de se rapprocher, ils découvriraient qu'il s'agissait seulement d'une illusion d'optique : leur couloir en rejoignait un autre, parfaitement perpendiculaire, qui s'en allait donc, toujours dans l'obscurité, sur la droite et sur la gauche.

Les murs de ce couloir étaient lisses, faits de belles pierres blanches bien équarries et encastrées les unes dans les autres avec un savoir-faire impressionnant. Nul livre, nulle étagère et nulle torchère ne semblait venir donner du relief à ce mur. On aurait dit qu'il s'étendait à l'infini des deux côtés.

Reyan sursauta en sentant quelque chose lui effleurer le mollet. Puis ce quelque chose passa entre ses jambes, manquant de le faire trébucher. Pestant intérieurement à l'idée que les ennuis commençaient déjà -ce qui était bien trop tôt à son goût- le roublard baissa sa torche et eut la surprise de découvrir un jeune louveteau au museau humide et aux yeux taquins. Partagé entre soulagement, honte de s'être laissé surprendre et une pointe d'énervement à l'idée que l'animal allait causer bien des ennuis s'il continuait ainsi, Reyan laissa échapper un juron.

- Koc'h ! C'te bestiole est incapable de rester en place ou quoi ?!

Comme s'il l'avait entendu et voulait confirmer ces mots, le louveteau fila devant lui, s'enfonçant dans l'obscurité. Quelque peu agacé, Reyan n'envisagea même pas la possibilité d'accélérer pour le rattraper. Tant pis pour lui. Après-tout, s'il devait choisir entre la vie d'un animal magique mal éduqué et celle des 5 membres de leur groupe, le choix était vite fait. Et puis, au moins, comme ça, il ne l'avait plus dans les pattes.
Il redressa donc sa torche et continua son chemin entre les étagères chargées de bouquins. Ses doigts le démangeaient. Il y avait sûrement des trésors enfermés entre ces pages. Des informations d'une valeur inestimable ou même des ouvrages au contenu sans valeur mais dont la seule couverture reliée devait valoir une fortune. Il avait malheureusement les deux mains prises et la responsabilité de mener le groupe. Il soupira tout en souriant. Là encore, Nathanaëlle l'avait bien eu en lui coupant toute possibilité de chaparder en route.

Soudain, il buta dans quelque chose de mou et chaud.
Baissant sa torche, il découvrit le jeune louveteau de Donovan arrêté devant un mur lisse. Si le mur en question ne l'avait pas interpellé d'emblée, il aurait sûrement de nouveau juré après l'animal. Mais la situation ne s'y prêtait pas.
Faisant signe d'une main aux autres de s'arrêter, il contourna le jeune animal à pas lents, posant un pied devant l'autre avec toute la souplesse et l'attention dont il était capable pour observer cet étrange cul de sac.

... qui n'en était pas un.
Il sourit. Son instinct ne l'avait pas trompé. Ils se trouvaient bien à un embranchement et allaient devoir choisir entre le couloir de gauche et celui de droite. Il fit signe à Nathanaëlle d'avancer et saisit sa carte. Il était temps de vérifier si le vieux Barjow ne s'était pas moqué d'eux. Il baissa sa torche et porta le bout de parchemin plié devant ses yeux.

C'était un morceau à peine plus grand que la paume d'une main, aux bords irréguliers, qui semblait avoir été arraché à un livre. Sur un côté on voyait encore quelques lettres calligraphiées à la main.
Un plan grossier y avait été tracé d'une main tremblante, à l'encre noire et à la plume.

On y voyait un hexagone un peu malformé représentant, vraisemblablement, la bibliothèque. Au centre, une simple croix. Tot autour de l'hexagone, une fine écriture en pattes de mouches en suivait le contour intérieur tandis qu'à l'extérieur, les quatre coins du parchemin étaient ornés de symboles différents, tantôt en couleur, tantôt de cette même encre noire qui avait servie à tracer le plan.

Le coin en haut à gauche s'ornait ainsi d'un petit bâton dans un cercle, suivi d'une série de petits symboles peints en rouge et blanc. Une bande blanche surplombant une bande rouge, le même symbole surplombant un coude blanc vers la gauche, puis encore la même chose, cette fois avec un coude vers la droite et enfin une croix, la bande blanche croisant la rouge pour former un X bicolore.

Le sourire du roublard se crispa en une grimace défaite tandis qu'il explosait intérieurement.
Ça, un plan ?! Crédiou ! Le vieux fou s'était bien moqué d'eux ! Ce qu'il avait sous les yeux n'était en rien une carte, tout au plus un gribouillis qui faisait illusion à cinq pas.
Certes, la croix, au milieu, semblait indiquer que ce qu'ils cherchaient devait se trouver au cœur même de la bibliothèque royale mais l'indication restait trop vague. Il n'avait aucune idée de l'étage, de la salle, du nombre de portes à passer, ni même de l'orientation des couloirs. En bref, rien qui puisse leur indiquer la direction à prendre. Reyan grinça des dents et ses doigts se crispèrent sur le parchemin. Cependant, il refusait de croire que leur aventure s'arrête ici. Cela défiait toute logique. Il respira un grand coup, desserra les doigts et se remit à réfléchir.

Le vieux Barjow avait visiblement besoin du bouquin. Il était donc dans son intérêt que leur équipe s'en sorte et lui ramène l'objet de sa convoitise. Pourquoi leur aurait-il mit des bâtons dans les roues alors. Il devait y avoir autre chose. Tout en réfléchissant à toute vitesse, le roublard porta à nouveau le parchemin devant ses yeux en le faisant tourner dans tous les sens. Son regard s'arrêta soudain sur les quatre coins du papier, recouverts de symboles étranges.
Il fronça les sourcils tandis que son regard s'illuminait. Voilà qui lui parlait. Voilà qui était dans ses compétences. Non pas la voyance et le hasard mais le décodage et la déduction.
Ses yeux noisettes se mirent alors à naviguer entre les différents symboles, mots, dessins... tentant de faire des liens, de percer un ordre, un motif récurent. Ses pensées allaient bon train, faisant le tri dans les informations, assemblant, classant, calculant les probabilités. Et bientôt, un schéma sembla se dessiner.

Ce petit trait vertical dans un rond, et si c'était un chiffre ? Le chiffre 1... une première étape ? Dès lors il se focalisa sur la série de quatre symboles qui ornait le coin en haut à gauche. Il n'avait jamais rien vu de tel mais il semblait évident que ces symboles entre eux devaient avoir une signification bien particulière. D'ailleurs, le même motif revenait rois fois : la bande blanche au dessus de la bande rouge. D'abord seules, puis au dessus d'un coude à gauche ou d'un coude à droite...
Il releva soudainement la tête, saisit d'une intuition, et observa les lieux : deux couloirs perpendiculaires, deux possibilités, un virage à gauche ou un virage à droite...

Son visage s'illumina tandis que dans sa tête sonnait le carillon de la victoire.

- Natha ! s'exclama-t-il d'un ton calme où perçait une pointe d’excitation. Il faut examiner les murs ! Il doit y avoir un symbole quelque part. Un symbole fait de bandes rouges et blanches. Expliqua-t-il en élevant sa torche le plus haut possible pour sonder du regard la surface lisse devant lui.

Il y avait plus qu'à espérer que les bons yeux de l'elfe fasse merveille dans ces couloirs obscures.

Le louveteau allait à droite, puis à gauche, ignorant le reste du groupe, il ne voyait pas grand chose pour ne pas dire rien du tout. Pendant ce temps, Donovan se demandait pourquoi le groupe s'était arrêté. Il ne voyait pas plus loin que ce que sa boule de feu ne lui permettait et n'osait pas avancer et changer l'ordre donné par Nathanaëlle de peur de faire une bêtise. Il regardait autour de lui, il ne savait pas combien de temps il avait marché, il ne savait même pas où il était . Reyan venait d'appelé la semi-elfe, le jeune mage ne savait pas pourquoi. Il s'adossa à un mur pour reposer ses jambes. La marche ne l'avait pas fatigué mais il voulait économiser son énergie pour la suite du périple. Il voyait que devant lui se trouvait Arthémise, peut-être qu'elle en savait plus que lui. Il se redressa s'approcha de la jeune femme, diminua l'intensité de la lumière se la boule de feu et demanda doucement :

- Dis, est ce que tu sais ce qui se passe toi?

Il souriait pour montrer de la sympathie mais il avait conscience que son visage ne montrait qu'incompréhension et curiosité. Il ne savait ni où il allait, ni s'il allait s'en sortir mais il savait qu'il s'était engagé dans cette aventure, il devait la suivre. Après tout, il n'était pas seul, il n'était pas forcément le plus expérimenté mais les autres semblaient l'être. Et après tout, il restait un mage de feu, il avait des compétences. Il se reprit, redressa son dos, et attendit une réponse de la part d'Arthémise. Il venait de se convaincre lui-même qu'il avait autant sa place que les autres dans ce groupe.

- Natha ! s'exclama Reyan d'un ton calme où perçait une pointe d’excitation. Il faut examiner les murs ! Il doit y avoir un symbole quelque part. Un symbole fait de bandes rouges et blanches.

Nathanaëlle se retint de reprendre le roublard. Sa manière de s'adresser à elle témoignait d'une familiarité presque indécente. L'appeler par un diminutif ... ils n'avaient quand même pas gardé Djidane ensemble !
Cependant, cette absence de formalité était typique de Reyan et la semi-elfe y était habituée. Aussi décida-t-elle de ne pas s'en formaliser.

Elle le rejoignit donc devant le mur et lui emprunta la carte, qu'elle détailla. Elle observa le plan en lui-même et les symboles qui l'entouraient, et en tira les mêmes conclusion que lui : il fallait scruter le mur en quête d'un signe rouge et blanc.

Elle longea donc le couloir de droite, ses yeux d'elfe guettant le moindre signe de ce qu'elle recherchait, faisant signe de temps à autre à Reyan de déplacer la torche qu'il tenait. Ses yeux hypersensibles n'avaient pas besoin de ce surplus de lumière, en réalité Nathanaëlle voulait éviter que les ombres et reflets projetés par la torche ne masquent à sa vue le signe tant recherché.

Elle continua ses investigations, parcourant parfois le mur du bout des bois en quête d'aspérités dues à de la peinture. Elle progressa ainsi, centimètre par centimètre, avec rigueur et minutie, espérant trouver la marque qui leur indiquerait le chemin.

Dans le cas contraire, elle devrait sans doute rebrousser chemin pour chercher ce même signe dans le couloir de gauche ...

La semi-elfe balayait des yeux le mur lisse, cherchant sans relâche le fameux signe rouge et blanc qui devait, selon elle et le roublard s'y trouver. La tâche était longue et fastidieuse mais les aventuriers n'étaient pas pressés... enfin, le vieux Barjow ne leur avait donné aucune limite de temps ni ultimatum.

Pendant que son regard elfique glissait sur les murs à la recherche du précieux indice, la jeune fille, peu soucieuse de ménager les susceptibilités, ordonnait au roublard de bouger sa torche de ci de là, à sa convenance, tandis que derrière l'improbable duo de tête, Donovan et Arthémise attendaient sans rien dire.

Le temps s'écoulait, lentement, implacable et silencieux... Quand soudain...

Deux choses arrivèrent simultanément, tel un coup du destin orchestré de main de maître :

Au moment même où les yeux de la jeune elfe se posaient sur un étrange X fait d'une bande blanche croisant une rouge, un grincement sonore se fit entendre suivit d'un claquement brusque et d'un appel d'air qui souffla d'un seul coup la torche que tenait le roublard. Et puis, plus rien.

Les quatre aventuriers se trouvaient maintenant dans le noir.

Peu contrariant, Reyan s'était contenté de lever, bouger, baisser, écarter ou approcher sa torche selon le bon vouloir de l'elfe pendant toute la durée de la recherche. Bien entendu, son esprit vif avait vite conclut que Nathanaëlle n'avait nul besoin de lumière pour espérer retrouver le symbole mais qu'au contraire, la clarté de la torche projetant des ombres sur le mur la gênait dans ses recherches. Il s'était donc montré docile. Le moment où il pourrait rendre la pareille à la guerrière viendrait bien en temps voulu. La patiente était une de ses qualités.

Soudain, un étrange grincement vint troubler le silence du sombre corridor suivit d'un claquement retentissant et le roublard eut tout juste le temps d'apercevoir quelque chose sur le mur que sa torche fut soufflée d'un seul coup, plongeant tout le petit groupe dans le noir complet.
Reyan réfléchit à toutes vitesses tandis que sa main gauche s'agitait sous sa cape à la recherche de sa pierre à feu. Il avait une petite idée de ce qui avait bien pu provoquer ces bruits et cet appel d'air. Une idée qui lui paraissait très probable et ne présageait rien de bon. Mais la prudence lui disait de toujours vérifier une intuition, aussi forte soit-elle.

Prit d'une inspiration soudaine, il se tourna vers ce qui lui semblait être le couloir par lequel ils étaient venus et dans lequel, quelques pas derrière lui, devaient se tenir Arthémise et Donovan.

- Hé, le magicien ! Souffla-t-il suffisamment fort pour être entendu. Refais une de tes boules de feu et va voir en arrière ce qu'il s'est passé.

Le ton employé était aimable mais ferme et n'attendait pas de discussion.
Puis il se tourna vers sa droite, où il espérait trouver Nathanaëlle.

- Il y avait un symbole n'est-ce pas ? Sur le mur ? Demanda-t-il à la semi-elfe. Si moi j'ai eu le temps d'apercevoir quelque chose, tu as dû le voir clairement je suppose ? Qu'est-ce que c'était ?

Donovan entendit un claquement et la torche de Reyan, qui était la seule source de lumière du groupe s'éteignit. Il s'apprêtait à allumer une boule de feu pour éclairer le groupe mais le roublard lui demanda de partir en arrière pour voir ce qu'il s'était passé. Donovan était un peu ennuyé de devoir lacher le groupe, non par crainte d'être seul mais par crainte de se perdre. Il répondit à Reyan par l'affirmative, alluma un petite boule de feu pour voir où il mettait les pieds et fit demi-tour. Il fût content de voir que son louveteau le suivait et marchait avec lui. Eldurulfur commençait à s'habituer à sa présence et marchait à la même vitesse que son maitre. Le jeune pyromancien marchait en faisant attention en marchant. Il espérait que les autres allait trouver quelque chose. Il ne connaissait pas Anarion et avait rencontré Arthémise quelques temps auparavant. Il se demandait s'ils avaient des compétences particulières dans l'obscurité ou dans les labyrinthes pour les aider. Mais comme Nathanaëlle leur avait demandé de l'aide, Donovan était sûr qu'ils avaient les ressources pour aider. A force de penser en marchant, le jeune sorcier arriva au bout du couloir avec son louveteau.

- Il y avait un symbole n'est-ce pas ? Sur le mur ? Si moi j'ai eu le temps d'apercevoir quelque chose, tu as dû le voir clairement je suppose ? Qu'est-ce que c'était ?

Nathanaëlle avait, tout comme ses amis, été surprise tant par le bruit que par la soudaine obscurité. Même ses yeux d'elfes, pourtant si perçants d'ordinaire, ne pouvaient pas discerner grand-chose dans le noir. Mais avant que la torche ne s'éteignent, en revanche, ils avaient eu amplement le temps de voir ce qui se trouvait sur le mur, et d'en graver l'image dans l'esprit de la jeune elfe. Aussi put-elle décrire clairement à Reyan ce qu'elle avait aperçu.

- ... Il y avait une croix, peinte à même le mur. Je pense qu'il s'agit du signe que nous cherchions : une bande blanche croisait une bande rouge, comme sur la carte du vieux Barjow.

À peine avait-elle fini sa tirade que la lumière revint. Une petite boule de feu venait d'apparaître entre les mains de Donovan, qui s'éloignait dans le couloir à la demande de Reyan. Enfin, "demande" était un bien grand mot. "Ordre" aurait mieux convenu. La guerrière s'étonna de la docilité de son ami, qui s'était exécuté sans protester ni manifester d'appréhension face au potentiel danger masqué par l'obscurité du couloir. Le mage avait, tout simplement, fait ce qu'on lui demandait sans se poser de questions. Si pareille attitude avait le mérite de limiter les querelles stériles au sein du groupe, Nathanaëlle s'inquiétait tout de même pour son ami. Elle espérait que le pyromancien, en d'autres situations, saurait s'affirmer et rembarrer, au besoin, quiconque s'aviserait de lui donner des ordres.

Pour l'heure, il importait de s'enquérir de ses trouvailles et de valider ou d'infirmer, au passage, l'hypothèse qui s'était formée dans l'esprit de l'elfe.

- ... Donovan ? Ce bruit était-il, comme je le pense, celui de la porte par laquelle nous sommes entrés ? S'est-elle refermée ?

Il était fort probable que oui, étant donné la nature du bruit et son origine. Cependant Nathanaëlle espérait s'être trompée, car si la porte était bel et bien close, elle empêcherait Anarion de les rejoindre. L'elfe avait, pour quelque obscure raison, tardé à pénétrer dans le couloir et se trouvait donc maintenant, selon toute vraisemblance, coincé derrière une porte close ...

En effet, Donovan se trouvait face à une porte close, il voulut l'ouvrir mais ne trouvait pas de poignée. Il augmenta la puissance de la boule de feu pour mieux voir. La porte de bois était bien fermée, aucun rayon de lumière ne passait. En regardant mieux la porte il remarqua que ce côté de la porte n'avait pas de poignée. Le problème était vite résolu se dit-il puis il se dit qu'il ne pourra pas voir les compétences d'Anarion puisque ce dernier était bloqué derrière la porte. Il tourna les talons et se dirigea vers le reste du groupe calmement, toujours avec Eldurulfur à ses pieds. Il dépassa Arthémise en s'excusant, pour se rapprocher de Reyan et de Nathanaëlle. Il tira une boule de feu sur la torche éteinte du roublard pour qu'il puisse voir et lui sourit. Il créa une boule de feu pour lui même et se tourna vers Nathanaëlle. Il se redressa, après tout il ne voulait pas paraître aussi inutile qu'il ne l'était. Il prit un air sérieux, et regarda ses deux interlocuteurs.

- La porte est fermée et je n'ai même pas trouvé de poignée. Par contre désolé votre ami... Anarion est sûrement bloqué de l'autre côté.

Il avait un air désolé mais se demandait également ce qui les attendait.

Il y eut un grincement sinistre, puis un claquement sonore.

Le vieux Barjow releva la tête du parchemin qu'il étudiait et avisa la porte close, à l'autre bout de son petit office en bazar. Puis son regard se posa sur Anarion et il éclata d'un rire moqueur.

- Hi hi hia ha ha hi.... te voilà bien seul, jeune elfe ! Tes amis sont de l'autre côté et toi... tu as mis trop de temps à te décider. Maintenant, j'ai bien peur que tu sois coincé ici avec le vieux Barjow.

Une lueur étrange et quelque peu... perturbante, brillait dans son oeil alors qu'il disait ces mots, puis, pris d'une soudaine inspiration, il ajouta :

- Mais le vieux Barjow a autre chose à faire. Oui, plein de choses. Trier, ranger, lire, chanter, éternuer... plein, plein de choses... et donc, un jeune elfe en armure n'a pas sa place ici. Tu peux sortir. Allez oust !

Et, se levant, il poussa Anarion d'une main pleine d'assurance et d'une force surprenante pour son âge. Il le poussa vers la sortie, par là où ils étaient venus. Le laissant seul dans l'escalier qui redescendait, il s'en retourna en sifflotant vers son bureau.

Les livres. Qui aurait cru que des livres eussent pu être un point faible ? Et pourtant il s'était laissé distraire par un livre particulièrement somptueux au dorures chatoyantes. Lassé de l'attitude de Nathanaëlle et Reyan, qui faisaient comme s'ils n'existaient pas, il s'était tourné vers la première chose qui captivait son attention... et en avait été sorti par le bruit de la porte qui se fermait.

- Hi hi hia ha ha hi.... te voilà bien seul, jeune elfe ! Tes amis sont de l'autre côté et toi... tu as mis trop de temps à te décider. Maintenant, j'ai bien peur que tu sois coincé ici avec le vieux Barjow.

Anarion haussa un sourcil. Jeune elfe ? L'humain était peut-être vieux pour ses pairs, mais pour lui il n'était qu'un enfant. Cependant il se garda bien de répliquer, puisque l'enfant en question disposait de toute évidence d'un certain arsenal à sa disposition. Puis il le poussa vers la porte avec force.

Pendant un instant, Anarion fut tenté de se tourner vers lui et de déchaîner son pouvoir. Quelle que soit la magie dont disposait ce vieil homme, il était peu probable qu'il soit de taille à résister à la magie séculaire de l'elfe. Le vieux ferait moins le malin, transformé en statue de glace...
Mais il abandonna l'idée rapidement et se laissa entraîner vers la sortie.

La vérité, c'est qu'il était plutôt soulagé. Il avait été déçu depuis le début par cette quête, où Nathanaëlle et Reyan prenaient les décisions sans leur laisser le loisir de participer ni leur demander leur avis. Bien souvent il avait voulu proposer son aide, mais on ne lui laissait pas le temps de la proposer. Sa fierté avait mal supporté de suivre un voleur qui s'était autoproclamé meneur, et si Nathanaëlle avait commencé en temps que leader d'un groupe, elle avait fini comme membre d'un duo. Ce n'était pas la vision qu'il avait d'une équipe, et si c'était celle de Nathanaëlle et de Reyan, alors il était aussi bien qu'il sorte.

Qu'ils se débrouillent, maintenant ! Une fois la porte passée, Anarion dirigea son regard vers la sortie. Il ne lui restait plus qu'à se diriger dans le couloir vers l'extérieur... Il était curieux quand à leur quête, bien sûr, mais il lui suffirait de demander à Arthémise comment cela s'était passé. Elle non plus n'avait pas pu faire grand chose... Peut-être serait-elle laissée derrière, elle aussi. Et pourtant...

Il ne pouvait pas laisser les choses en état. Il avait été laissé sur la porte, seul... Ma foi, il est peut-être temps d'en profiter. Il allait travailler comme il l'avait toujours fait, de la manière qui avait été la plus efficace jusque-là.

Seul.

La solution était évidente. Devant lui, massive, brillante, se tenait la porte métallique, avec ses verrous, ses runes et ses chaînes. Anarion s'approcha avec prudence: il savait parfaitement que des symboles inconnus gravés dans une porte métallique signifiaient des glyphes protecteurs très puissants, et même si ce n'avait pas été le cas, il aurait été arrêté par la serrure et la chaîne. Il fallait les étudier de plus prés... s'approchant de la porte, il se remémora ses cours de runologie. Un domaine dans lequel il était bon.

Il commença par le coin inférieur droit. Alors. Rune moriaque parallèle... un classique. Facile. Ensuite... tiens, une elfique noldor double spirale. Pas évident, ça. Il continua ainsi jusqu'à ce qu'il ait identifié chaque rune gravée sur la porte, ou du moins la plupart. Certaines lui étaient inconnues, ce qui n'était pas bon signe.

S’accroupissant sur le sol, il ferma les yeux et se mit en posture de méditation - c'était un art que les elfes avaient porté à sa perfection, qui leur permettait de réfléchir trois fois plus vite et de concentrer leur mémoire. Il passa diverses solutions en revue, imagina des scénarios, calcula les probabilités, tout en se passant de la musique lyrique en arrière-plan; mais si sa pensée virevoltait à la vitesse de l'éclair, il y avait dans ses équations trop d'inconnues. Cependant il n'était pas dans sa nature de baisser les bras; il sélectionna donc le plan qui avait les plus grandes chances de réussites et se sortit de sa méditation.
Debout face à la grande porte, il inspira plusieurs fois, laissant la magie venir à lui, vibrant de puissance, en un frisson qui le parcourait tout entier. Fermant les yeux, il appela à lui l'eau qu'il avait entendu couler plus tôt, et il la sentit plus qu'il ne la vit couler hors des fissures des murs et du sol, d'abord goutte par goutte puis par minces filets, vers lui. C'était une eau fatiguée, sale et vieille, mais encore puissante et prête à servir. Les filets s'amincirent puis se tarirent, et il se retrouva avec un peu moins d'un mètre cube d'eau. C'était largement suffisant.

Inspirant un grand coup, il envoya l'eau vers la porte. Il l'envoya dans les serrures et les verrous, il l'envoya dans les runes gravées, il l'envoya dans toutes les minuscules fissures invisibles à l’œil nu qui parsemaient la porte et la chaîne. Puis il fit appel au froid.

L'eau ralentit ses mouvements puis se figea. Du givre la recouvrit, ainsi que les murs proches. Son souffle se cristallisa devant lui, tandis qu'il donnait toute sa magie pour faire baisser la température toujours plus bas. Sur le sol, un carreau, proche de son pied, se fendit d'un coup sec. Il entendit très nettement la porte grincer. Cela semblait marcher... l'eau n'était pas magique, et nulle magie n'attaquait la porte directement. Il contournait les runes par les simples lois de la physique.

- La porte est fermée et je n'ai même pas trouvé de poignée. Par contre désolé votre ami... Anarion est sûrement bloqué de l'autre côté.

Donovan n'avait fait que constater et confirmer ce que pensait Reyan. Il cocha mentalement la case porte fermée dans son esprit et les conséquences de cette information comme on continue à quatre ou plus d'issue derrière nous. Cette dernière impliquait d'ailleurs qu'ils avancent... ce qui le ramena à leur souci actuel. A droite ou à gauche ?

Nathanaëlle avait parlé du symbole, sur le mur de droite. A droite alors. Mais son instinct lui disait que quelque chose n'allait pas. A la lumière de sa torche rallumée par le magicien, il regarda de nouveau son parchemin, essayant de trouver un sens logique aux petits symboles rouge et blancs. Il semblait y avoir quatre différents : les deux bandes parallèles, le coude à gauche, le coude à droite et la croix. S'il paraissait plus que probable que les deux coudes indiquaient un virage, les deux autres symboles étaient plus nébuleux. Mais son esprit lui soufflait qu'une croix ne pouvait pas signifier "par ici". Dans ce cas, le chemin de droite n'était pas le bon. A gauche alors ? Il hésita. Sa théorie reposait sur trop d'instinct et de généralisation pour être sûre et il ne pouvait se permettre de mener le groupe dans la mauvaise direction.

Il replia le morceau de parchemin qui lui servait de carte et, armé de sa torche, il entama l'inspection du mur de gauche, le regard à l'affut du moindre symbole de couleur pouvait étayer ou révoquer sa théorie.

Anarion s'était laissé raccompagner à la sortie docilement, laissant le vieux Barjow refermer la porte derrière lui en sifflotant. Il se trouvait alors sur ce même palier où le petit groupe s'était arrêté quelques heures plus tôt, face aux deux portes. La petite en bois venait de se refermer dans son dos et la grande métallique... eh bien elle n'avait pas bougé d'un pouce. Elle était toujours aussi impressionnante avec sa surface froide et lisse, sa serrure compliquée et ses symboles étranges.
L'elfe se mit alors à les étudier, comme s'il avait décidé de faire cavalier seul. Mais savait-il où menait cette porte ? Et ces symboles étranges, était-il bien sûr qu'il s'agissait de runes ? Certes, certains y ressemblait beaucoup mais seul un mage très puissant et très ancien, auteur de ces signes cabalistique aurait pu répondre. Hélas, il était mort depuis longtemps, victime d'une intoxication alimentaire qui l'avait fait se vider par les deux bouts en moins de deux jours. Tout ça à cause de baies qui n'en étaient pas. Comme quoi, nul n'est expert dans tous les domaines.

Lorsqu'il sortit de la méditation elfique dans laquelle il s'était plongé, Anarion semblait avoir déterminé un plan d'attaque, qu'il mit de suite à exécution. En bon mage de l'eau qu'il était, l'elfe fit appel à son élément de prédilection et en quelques instants, il obtint un petit mètre cube d'eau croupie. puis, inspirant un grand coup, il envoya l'eau vers la porte essayant de la faire s'insinuer dans le moindre interstice de la porte de métal. Puis il fit appel au froid.Du givre recouvrit lentement la porte, ainsi que les murs proches. Il y eut un grincement. Le métal semblait réagir au froid. Anarion avait-il réussi ? Venait-il de contourner de puissants sortilèges grâce aux simples lois de la physique ? Le grincement se fit plus fort, plus long, plus... grinçant. Puis un claquement se fit entendre. La serrure ?
Soudain un symbole au apparut en lumière au milieu du panneau métallique de la porte. Il se mit à briller. De plus en plus, tandis qu'un bourdonnement emplissait les lieux, résonnant à l'infini dans le couloir derrière l'elfe. Le bourdonnement continua à s'amplifier et la lumière à briller, jusque l'es deux deviennent insoutenable.
Alors le givre se mit à fondre à toutes vitesses, redevant eau liquide. L'eau s'accumula et il y en avait plus qu'un mètre cube. Et soudain, avec la force d'un geyser, elle jaillit. Elle jaillit des serrures et des verrous. Elle jaillit des runes et symboles qui recouvraient la porte. Elle jaillit de toutes les minuscules fissure qui sillonnaient la porte. Elle jaillit de l'étrange symbole lumineux au milieu du panneau de métal. Elle jaillit avec une puissance inouïe, et tel un torrent, frappa le mage elfique de plein fouet et l'emporta dans son flot enragé, le ballotant dans les couloirs, dans les escaliers, dans les tunnels, arrachant la mousse des murs, emportant les livres des étagères.... jusqu'à exploser à l'air libre.

C'est dans la ruelle sombre derrière la bibliothèque que les flots se dispersèrent, lavant à grande eux les pavés sous le regard impassible des oiseaux sur leurs gouttières. Et c'est dans cette même ruelle que se retrouva projeté, sur le dos, par la puissance majestueuse des flots, l'elfe en armure. Une chose était sûre maintenant. Les symboles sur la porte étaient bien des sorts de protection. La preuve en était qu'Anarion, aussi intelligent et rusé qu'il ait été, s'était vu renvoyer son sort, avec une puissance qui dépassait la sienne. Et voilà que la porte secrète menant à la bibliothèque royale, celle là-même que Reyan avait déverrouillée pour eux quelques heures plus tôt se referma sans un bruit. A peine eut-elle claquée qu'un discret rayon de lumière en fit le tour. Lorsqu'il disparut, toute trace de la porte avait disparut avec lui.

Anarion est hors-jeu !

Pendant ce temps, à l'intérieur de la bibliothèque, les quatre aventuriers restants semblaient toujours coincé à l'intersection des deux couloirs. Le grincement de la porte se refermant les avait peut-être surpris mais ils semblaient avoir deviné de quoi il retournait. Cependant, la méfiance et la prudence dont faisait preuve le roublard montrait que la disparition de leur seule issue de secours avait donné un peu plus de sérieux et de réalisme à leur aventure.
Le jeune homme, armé de sa torche entama donc l'inspection du mur de gauche.
Ce n'est qu'au bout de quelques minutes, longues et interminables que la torche éclaira, à la limite du plafond, les deux bandes blanches et rouges tant attendues. En dessous, une troisième bande, blanche, formait un coude vers la gauche.