... C'est nul ici !

Nathanaëlle flânait aux alentours de la cité. La journée était belle, ce qui la mettait de mauvaise humeur. Elle trouvait le soleil trop brillant, l'air ambiant trop chaud et la vallée trop belle. Tout ce qu'elle détestait.

Elle fit quelques pas de plus sur l'herbe verte, avant de faire un tour sur elle-même afin de scruter l'horizon. Prosper, le serveur de la Taverne des Os Enflammés, lui avait chaudement recommandé cet endroit lorsqu'elle lui avait demandé s'il connaissait un lieu calme et tranquille où se reposer un peu, en plein air de préférence et à l'écart de la ville. Elle avait donc fait tout le chemin à pieds pour quitter le quartier des Nobles, rejoindre les portes, sortir de la cité et gagner la Vallée.

Et maintenant qu'elle était là, elle se demandait ce qu'il lui avait pris. Elle avait beau se tourner, se retourner encore et encore, elle ne voyait rien. Rien que cette immense étendue d'herbe qui semblait se prolonger à l'infini.

C'était beau, vraiment. La nature à l'état pur, l'ombre des oiseaux qui se laissaient porter par les courants loin au-dessus de sa tête, le soleil qui dorait les nuages.

Une nouvelle fois, l'elfe se demanda ce qu'elle faisait ici. Elle aurait été plus à sa place dans un recoin obscur de la bibliothèque, ou perdue entre les cimes des arbres centenaires de la forêt. Ça lui aurait au moins évité la vision de cet insolent, insondable ciel bleu.

Elle s'assit sur le sol, dépitée. Après avoir fait tout ce chemin ... quelle déception. Dire qu'elle avait même pris la peine d'emporter un pique-nique !
Et comme personne ne passait jamais dans le coin, du moins pas volontairement (il était arrivé que certains s'égarent), la journée risquait de lui paraître très longue.

Elle soupira, avant de résumer à haute voix son opinion sur cet endroit :

- ... C'est nul ici !

Une matinée magnifique se projetait dans l'esprit du jeune mage lorsqu'il ouvrit les volets de sa chambre prise à l'auberge. Il se dirigea vers la cheminée pour éteindre les dernières braises ce qui a eu comme conséquence de faire apparaître Eldurulfur qui prit la sacoche de Donovan et couru avec dans tous les recoins de la chambre tant que son maitre le suivait.

Donovan s'arrêta de poursuivre le louveteau, s'assit sur son lit, le louveteau s'approcha doucement de Donovan qui en profita pour prendre sa sacoche, finir de s'habiller et partir prendre un lait de chèvre. L'animal disparu et son maitre commanda.

Après avoir terminé son lait de chèvre, le jeune Pyromancien se rendit dans un coin calme. Il avait l'habitude d'y aller pour s'entrainer aux sorts.

Lorsqu'il arriva vers son endroit calme, il remarqua une silhouette. Il décida d'avancer doucement, sans se faire remarquer. Alors qu'il s'avance doucement, Eldurulfur apparait et court vers la personne.

Donovan regarda fixement la bestiole, il pensa très fort à sa disparition, Eldurulfur le regarda et disparu. Donovan continue sa marche furtive jusqu'à ce qu'il reconnaisse que la personne était Nathanaëlle. Il allait partir pour la laisser tranquille quand il ressenti une aura négative, il se rapprocha doucement en silence. Il arriva à hauteur de son amie qui venait juste de se plaindre de l'endroit.

Donovan plongea sa main dans sa sacoche et en sortie quelques biscuits, il tendit la main vers son ami et comme pour se faire remarquer répondit à la remarque de la semi-elfe:

- Je t'assure que c'est moins nul avec des cookies.

Affirma-t-il un grand sourire sur ses lèvres.

Nathanaëlle entendit arriver le loup, qui l'avertit de l'approche de son maître. À vrai dire, toute absorbée qu'elle était à détester sa journée et haïr chaque brin d'herbe, elle en avait oublié d'être prudente et de maintenir ses sens en éveil. Non pas que cette partie du royaume soit dangereuse, loin de là, mais il fallait toujours se méfier : on ne savait jamais qui pouvait vous surprendre ...

Ce fut Eldurulfur, en l’occurrence. Suivi par Donovan. Puis le loupiot disparut, et le mage fut bientôt seul. Il s'approcha de la jeune elfe d'un pas qui se voulait furtif, avant de plonger la main dans sa sacoche pour en sortir ... un cookie.

Si Nathanaëlle n'avait pas été de si mauvaise humeur, elle en aurait souri. Donovan semblait penser que les cookies étaient la solution à tous les maux, une théorie qui se défendait mais à laquelle la guerrière n'adhérait pas.

- Je t'assure que c'est moins nul avec des cookies.

La jeune prit le cookie et en croqua une bouchée. Quoi qu'elle pense de ces biscuits, de la nourriture gratuite ne se refusait pas, surtout quand elle était offerte avec tant de bonne volonté.
Elle tenta de réprimer son mécontentement lorsqu'elle s'adressa à son ami.

- ... Bonjour, Donovan. Toi aussi, tu es venu ici pour profiter de ce magnifique soleil et de la beauté du paysage ?

Le sarcasme dans sa voix transparaissait sans peine, et une part d'elle espérait que le jeune mage n'en prendrait pas ombrage. L'autre partie était trop occupée à se complaire dans son malheur pour prêter attention au monde autour d'elle.

Nul doute que le pyromancien, avec son caractère naturellement bon et joyeux ne s’offusquerait pas de la mauvaise humeur passagère de la semi-elfe. Peut-être même arriverait-il à lui rendre plus joyeuse cette journée qui avait pourtant mal commencé.

En tout cas, ils étaient là tous les deux et devraient composer l'un avec l'autre. Restait à espérer que l'exercice ne serait pas trop difficile ...

Elle acceptait le cookie et demandait à Donovan s'il était venu admirer le paysage avec un sarcasme qui fit sourire le jeune mage. Il prit un cookie de sa poche et commença à le manger. Le paysage n'était pas forcément si magnifique, il était habituellement calme et c'est pour cela qu'il venait. Pour éviter de déranger des gens ou d'être dangereux quand il s'entrainait. Il mangeait son cookie en réfléchissant à une réponse. Il ne savait pas quoi dire pour faire apparaitre un sourire sur le visage de son amie. Il chercha dans sa mémoire ce qu'il pourrait faire rire la semi elfe mais en vain. Il regardait légèrement derrière elle, l'endroit où il avait l'habitude de s'entrainer.

L'endroit était facilement remarquable par les herbes brulées formant un parfait cercle. Il pensa que l'entrainement pouvait attendre, son nouvel objectif était désormais de rendre la journée de Nathanaëlle plus joyeuse. Ne sachant pas comment aborder ceci du côté de l'humour, il décida d'opter pour la franchise et d'aider son amie.

Puis il se rendit compte que sa réflexion commençait à être longue et que Nathanaëlle pouvait croire qu'il se transformait en statue.

" Excuse moi, je réfléchissais, à vrai dire, non je ne viens pas ici pour la beauté du paysage" commença-t-il avec un léger rire.

"Tu n'as pas l'air d'être au maximum de ta forme aujourd'hui, quelque chose préoccupe ton esprit? " ajouta-t-il avec un sourire au lèvres espérant qu'il sera contagieux.

- Tu n'as pas l'air d'être au maximum de ta forme aujourd'hui, quelque chose préoccupe ton esprit?

Cette simple question, malgré toute la candeur et la bonne volonté dont elle était empreinte, énerva la jeune elfe. Rien de précis n'occupait son esprit, non, elle était simplement de mauvaise humeur. Avait-elle besoin d'avoir une bonne raison pour détester le monde ? Elle s'était levée du mauvais pied, voilà tout. Et le ciel était trop bleu, et le temps était trop beau, et elle détestait ça. Les journée comme celle-ci lui rappelaient beaucoup de mauvais souvenirs.

Inconsciemment, elle se rendait compte que son attitude était idiote. Personne à part elle ne pouvait comprendre pourquoi elle haïssait les beaux jours et adorait la pluie et l'orage. La plupart du temps, elle passait juste pour quelqu'un de coincé et de réfractaire aux normes, voire psychorigide ou dérangé.

Ses raisons étaient complexes et profondément enfouies en elle, liées à son passé et les traumatismes qu'il lui avait laissés. Son enfance n'avait pas été heureuse, loin de là, et même aujourd'hui alors qu'elle se considérait comme une adulte, il lui restait des blessures qui n'avaient pas cicatrisé. Les choses s'étaient un peu améliorées récemment, depuis qu'elle s'était décidée à en parler à Anarion et s'ouvrir à lui. Mais il faudrait sûrement encore beaucoup de temps avant qu'elle trouve le courage de tout lui raconter, et en attendant ce jour elle était condamnée à faire comme tout le monde : serrer les dents et avancer.

La plupart du temps, elle y arrivait bien. Mais pas aujourd'hui, de toute évidence. La faute à la fatigue, peut-être.

- ... Rien en particulier. Je suis de mauvaise humeur, c'est tout.

Nathanaëlle s'aperçut après avoir prononcé ces mots que son ton avait pu paraître un peu sec, cassant. Elle s'en voulut de passer ainsi ses nerfs sur le premier venu ; Donovan n'était en rien responsable de ce qui se passait dans sa tête et il était injuste de s'en prendre à lui.
Elle reprit donc, un peu plus calmement.

- Qu'est-ce qui t'amène ici, si ce n'est pas le paysage ?

Le jeune mage a immédiatement remarqué l'agacement dans le ton de son amie. Il avait posé une question stupide, il était en train de déranger la semi elfe à un moment où elle préférerait être seule. Il s'en voulait sincèrement d'être si maladroit. La semi-elfe semblait vouloir faire bonne figure devant lui en lui demandant ce qu'il faisait ici.

" A vrai dire, je venais m'entrainer à la magie, je vois que je t'ai dérangé dans tes pensées et que j'ai manqué de tact avec ma question, je te pris de m'excuser."

Sans même attendre la réponse de son amie, il lui sourit, un sourire qui se voulait amical et de pardon d'avoir été si malpoli.
Donovan se décala, avança jusqu'au cercle d'herbes brûlées. Il déposa sa sacoche à l'extérieur du sac et sans même avoir besoin d'une grande concentration, il commença à s'entrainer.

Il commença doucement avec quelques boules de feu qu'il lançait d'abord droit, puis en faisant des effets. Pendant qu'il s'entrainait à viser les mouches inutilement il pensait à ce qu'il venait de vivre. Encore une fois, il avait été incompétent lors d'une discussion avec quelqu'un. Il venait d'arriver à Sinastra, Nathanaëlle était l'une des seules personnes qu'il connaissait et il avait réussi en moins de 5 minutes à la déranger et à dire quelque chose de stupide et de déplacé. Il s'en voulait il était en colère contre lui-même. Pourquoi arrivait-il à percevoir ce que les gens ressentaient sans pouvoir agir de manière appropriée? Il pensait si fort, il s'en voulait tellement qu'il ne fit pas attention au fait qu'il gardait une boule de flammes entre ses mains. La boule grossissait de plus en plus.

Ces pensées négatives lui rappela quelques événements de son passé avec les enfants de son village. Alors qu'une larme commençait à apparaitre au coin de ses yeux, il la retint. Il remplaça la tristesse par de la colère contre lui-même et envoya la boule avec une puissance beaucoup plus forte qu'il ne le souhaitait. La boule toucha un oiseau qui décéda, cuit sur place et qui tomba sur le sol, entre Nathanaëlle et le jeune mage.

- À vrai dire, je venais m'entrainer à la magie, je vois que je t'ai dérangée dans tes pensées et que j'ai manqué de tact avec ma question, je te prie de m'excuser.

Nathanaëlle serra les poings. Elle était la dernière des imbéciles ! Sa colère contre elle-même et contre son passé avait blessé son ami. Ce n'était pourtant pas ce qu'elle souhaitait, bien au contraire. Le pyromancien était arrivé récemment dans la cité, et la semi-elfe ne le connaissait pas encore très bien, mais il paraissait être honnête et profondément gentil. Elle le considérait déjà comme l'un de ses amis, et s'en voulait d'avoir rejeté sur lui sa mauvaise humeur.

Elle le regarda s'éloigner de quelques pas en réfléchissant à ce qu'elle pouvait dire ou faire pour se rattraper, lorsque Donovan fit apparaitre une boule de feu. Au lieu de la lancer en l'air comme toutes les autres il la garda entre ses mains, visiblement perdu dans ses pensées. Un instant, Natha eut peur qu'il n'oublie totalement ce qu'il était en train de faire, et que la boule lui explose à la figure. Cela aurait été dommage, parce que la jeune elfe n'aurait rien pu faire d'autre que partir en courant. Et elle aimait ses amis crus, pas à point. Ils avaient moins de répondant une fois cuits, en général.

Heureusement, le mage ne brûla pas. Un petit oiseau qui passait par là, en revanche, n'eut pas la même chance. Donovan lança la boule en l'air, et le volatile atterrit sur le sol, pile entre l'elfe et son ami. La fumée qui s'en dégageait et l'odeur de brûlé qui commençait à imprégner l'air ne laissaient pas de place au doute quant à l'état du pauvre animal.

Nathanaëlle, surprise par le tour qu'avaient pris les événements, ne bougea pas d'un pouce. Elle se contenta de regarder l'oiseau, puis Donovan, puis l'oiseau, puis Donovan.

Elle se contenta d'un unique commentaire.

- ... On dirait que le dîner est servi ...

Un sourire fit immédiatement son apparition sur le visage du jeune mage. Il ne résistait jamais à l'humour bien placé, réfléchi et spontané. Il regarda le cadavre de l'animal sur le sol, il ne comptait pas l'approcher. Il n'avait rien contre le fait de manger des poulets, des dindes et d'autres volailles mais il n'avait pas envie de s'embêter pour un moineau.

Il regarda son amie, c'était bête de renfermer sa colère, sa tristesse juste parce qu'il avait mal pris une réponse qui ne se voulait pas forcément contre lui. Il prenait trop souvent les mots pour lui; il prenait les négatifs de manière trop directe et les positifs comme de la simple politesse ou du mensonge. Il sourit à la semi-elfe, il aimait bien Nathanaëlle, elle avait toujours été sympathique avec lui, elle avait pris beaucoup de son temps pour l'aider et avait toujours été correcte avec lui.

Il sorti du cercle d'herbes brulées, pris sa sacoche, en sorti une boule de tissu qu'il utilisait pour jouer avec Eldurulfur. Ne sachant pas comment rétablir le dialogue. Il lança la balle en cloche vers Nathanaëlle avec une vitesse moyenne pour que celle-ci puisse se rendre compte de l'action. Il annonça:

" Reflexe!!"

- Réflexe !!

La boule de tissu filait dans l'air vers la jeune elfe. Celle-ci la vit arriver et très lentement, presque avec flegme, elle se décala de quelques pas et laissa l'objet finir sa course dans l'herbe. Elle leva vers Donovan un regard interrogatif, avant de se décider à aller chercher la balle.
Elle la ramassa et l'observa avec circonspection, avant de se tourner de nouveau vers son ami.

- ... Je ne sais pas comment c'est chez toi, mais chez moi quand on te lance par surprise un objet inconnu tu fais en sorte qu'il ne te touche pas.

Elle fit tourner la boule de tissu entre ses doigts quelques instants avant de la renvoyer à toute vitesse vers le jeune mage, sans aucun signe d'avertissement.
Elle retourna alors s'asseoir dans l'herbe, sans même vérifier que le missile était arrivé à bon port.
Elle sembla pensive durant quelques minutes, puis elle se décida à reprendre la parole.

- ... Intéressant, ton entraînement. Tu n'as jamais pensé à utiliser des cibles ?

Tout en prononçant ces mots, elle avait sorti un petit couteau accroché à sa ceinture et entrepris de creuser un trou d'environ dix centimètres sur sept, et dix de profondeur. Lorsque cela fut fait, elle prit délicatement l'oiseau mort et le déposa dans le trou. Puis elle remit la terre dans le trou et reboucha soigneusement.
Levant les yeux vers son ami, elle lui adressa un petit sourire ironique.

- ... Des cibles autres que les oiseaux, je veux dire. Pour t'entraîner à viser. En terme de puissance tu as l'air d'être au point, mais qu'en est-il de la précision ?

La guerrière savait, pour avoir pris part à de nombreux combat, que l'une sans l'autre ne valait pas grand-chose. Elle avait vu de puissants épéistes être défaits par des adversaires plus faibles qu'eux, mais qui faisaient mouche avec plus d'habileté.
Et la même vérité régissait la magie. L'important n'était pas d'être excellent dans un domaine, c'était d'être bon dans tous. Cette leçon, elle l'avait apprise à ses dépens et elle comptait bien éviter à Donovan pareille déconvenue.

"Oui c'est pas fa..."
Donovan n'a pas pu finir sa phrase, il venait de se prendre la boule de tissu dans la face. Il fut légèrement sonné. Il secoua sa tête, repris ses esprits pour entendre la question de la semi-elfe.

Alors qu'il allait répondre que les oiseaux pouvait servir de cible d'un ton ironique, Nathanaëlle le dépassa et fit le trait d'humour avant lui. Il réfléchissait à la question de son amie. Savait-il viser? Bien sûr qu'il le savait, il visait même mieux qu'il frappait et qu'il lançait de sort puissant. Il était juste emporté par ses émotions quand il avait causé le décès prématuré de cette boule de plume. Et puis c'était un petit oiseau, à peine plus grand que son poing au vu du trou creusé par Nathanaëlle.

Revenant sur sa réflexion, il voulait répondre la vérité mais ne pas paraitre hautain, orgueilleux, il opta quand même pour la vérité.

" Bon, à vrai dire... à part ce malheureux accident" dit-il en montrant la tombe du piaf
"Je vise sur des cibles que je fais sur du papier ou que je créé en feu un peu comme ça"

Liant le geste à la parole, un dessin de cible en feu apparu dans les airs à hauteur d'épaule, face au mage.

"Donc en général, avec ma magie, je suis plutôt bon en visée contrairement aux armes non magiques pour être franc. J'arriverais même à me blesser avec ta dague"

Nathanaëlle retint in extremis le sourire narquois lui venait aux lèvres. Elle en avait vu, des gens se blesser avec leur dague ! Des soi-disant funambules et autres jongleurs de bas étages, incapables ne serait-ce que de couper du jambon sans y laisser un doigt ou deux. Ce genre d'incidents, lorsqu'ils n'étaient pas graves, faisaient rire la semi-elfe. Elle-même maniait les lames avec tant d'habileté qu'il lui semblait parfois que son épée était une extension de son corps, et non un simple objet qu'elle tenait en main.

Toutefois elle se souvenait du temps où ces armes l'effrayaient. Elle avait appris à les manier afin de pouvoir défendre sa vie dans l'environnement hostile où elle avait grandi, mais jamais elle n'avait brandi une arme de gaieté de cœur. Son épée était avant tout un moyen de dissuasion, et elle espérait qu'elle le resterait longtemps.

Ces considérations mises à part, la jeune fille trouvait intéressant le profil de Donovan. En un sens, il était son opposé : elle excellait à l'épée mais ne savait se servir de la magie qu'en force brute, sans fioritures ni précision. Peut-être le mage et l'elfe pourraient-ils chacun apprendre du savoir de l'autre ...

Cette idée avait à peine germé dans son esprit, que Nathanaëlle sut qu'elle était bonne. Voilà longtemps déjà qu'elle souhaitait améliorer sa capacité à lancer des sortilèges, et son ami pourrait le lui enseigner. En échange, elle lui apprendrait à se servir d'une lame sans se vider de son sang. Oui, décidément, tous deux avaient beaucoup à gagner de cet arrangement ... si le mage acceptait la proposition.

- ... Je pourrais t'apprendre à manier une lame. Je suis plutôt bonne avec une épée. Et toi, en échange, tu m'aiderais en magie ... ça te va ?

Ne voulant pas laisser la cible magique en l'air comme ça, il décida de la faire disparaitre, donc toujours en regardant son amie, il dirigea son bras vers la cible et lança une boule de feu de faible puissance et toucha sa cible. Puis Nathanaëlle me proposa de s'entraider, elle l'aiderait à manier des lames et elle lui demandait de l'aider en magie. Cette proposition était très intéressante mais il ne savait pas si c'était une bonne idée, elle verrait que Donovan n'était vraiment pas doué pour les armes de corps à corps. Il fit signe à Nathanaëlle qu'il souhaitait y réfléchir quelques secondes. Il ferma les yeux, et imagina la dernière fois qu'il avait manier une épée, en fait il n'a pas eu besoin de se souvenir de beaucoup, il ne l'avait jamais fait.
Un jour, quand il était enfant, il voulut apporter l'épée à un homme du village mais ne réussi même pas à soulever l'épée sans la faire trainer.
Il ouvrit les yeux, non pas parce qu'il avait terminé sa réflexion mais parce que son louveteau lui mordait le mollet. Il regarda le louveteau qui couru vers Nathanaëlle avant de s'arrêter à côté de la guerrière.

Un sourire se dessina sur le visage du jeune mage, s'approcha et tendit la main à Nathanaëlle

- Ca me va, mais je te préviens je suis vraiment nul.

Nathanaëlle fut plus que satisfaite par la réponse du jeune mage. Tous deux avaient beaucoup à apprendre l'un de l'autre, or tout apprentissage reposait avant toute chose sur la volonté, ce dont Donovan semblait ne pas manquer. Voilà qui leur faciliterait les choses.

La guerrière lui fit signe de ne pas bouger, tandis qu'elle partait à toute allure vers la cité. Elle traversa les rues au pas de course jusqu'à atteindre le quartier général des gardes des remparts. Saluant de la tête ceux qu'elle reconnaissait, elle gagna l'armurerie et se saisit de deux épées d'entraînement en bois, et de deux autres en métal
Elle consigna l'emprunt dans le registre dédié, et repartit comme elle était venue.

Rejoignant son ami dans la vallée quelques dizaines de minutes plus tard, elle posa entre eux les quatre épées.
- ... Nous commencerons avec des épées en bois, je pense que cela te mettra plus à l'aise. Lorsque tu auras pris de l'assurance, nous pourrons utiliser les autres.

Elle se saisit d'une épée en bois et tendit l'autre à Donovan.

- ... Bien, commençons. Mets ta main gauche tout en bas du pommeau, et place ta main droite juste au-dessus, en dessous de la garde.

Nathanaëlle venait de partir laissant le mage seul. Il s'assit sur un rocher et continua son entrainement. Il jetait de boule de papier qu'il devait détruire à coup de boules de feu. Le vent étant changeant rendait l'exercice plus difficile. Il n'en loupa que deux sur la douzaine de cibles mises en place. Puis il joua avec Eldurulfur, il lui fit apprendre quelque tours simple et il mangea quelques biscuits.

Il était d'ailleurs en train de manger un biscuit quand son amie réapparue auprès de lui, deux épées en bois dans la main. Elle lui a donné une épée qu'il prit avec hésitation et quelques tremblements. Il était stressé, ne savait pas quoi faire de cette arme. Il resta planté là, devant la semi-elfe. Il lui sourit dt exécuta ce qu'elle lui demandait de faire.

Cependant, il ne se sentait pas à l'aise comme cela et avait une idée de pourquoi.

- Excuse moi mais je ne me sens pas à l'aise comme cela, est-ce que ça a un rapport avec le fait que je sois gaucher?

Demanda-t-il timidement?

Nathanaëlle ne s'attendait pas à ça. Elle savait, bien sûr, que certaines personnes étaient gauchères, mais elle ne voyait pas ce que cela avait à voir avec le maniement de l'épée. Elle-même avait appris à être aussi habile d'une main que de l'autre à un très jeune âge, et elle oubliait parfois que tout le monde n'avait pas cette faculté. Les guerriers aguerris maniaient l'épée d'une seule main, afin de pouvoir tenir un bouclier ou un poignard de l'autre. Mais pour les débutants, comme Donovan, la méthode à deux mains était de loin la plus simple, celle qui nécessitait le moins de travail et d'agilité.

La semi-elfe n'avait pas le temps de tout apprendre au jeune mage, de commencer par les bases (déplacements, jeu de jambes, entraînement au bâton ...), et il faudrait se contenter de cette méthode. Si son ami se sentait mieux avec la main gauche au-dessus, cela n'avait que peu d'importance.

La guerrière prit soin de noter dans un coin de son esprit le fait que Donovan était gaucher, puis elle se décida à lui faire part du fruit de sa réflexion.

- ... Peu importe, l'important est que tu sois à l'aise. Qu'une main ou l'autre soit en-dessous ne change rien. L'important, c'est de bien tenir ton épée. Rien ni personne ne doit pouvoir te l'arracher des mains.

Nathanaëlle recula de quelques pas et s'écarta des lames restées à terre. Passant son épée de bois dans sa main gauche, elle se mit en garde : bras gauche en avant, bras droit derrière le dos, solidement campée sur ses jambes, elle était prête à encaisser la botte à venir.

- ... Pour le reste, c'est en forgeant que l'on devient forgeron ! Attaque-moi. Frappe comme tu veux, je saurai parer.

Lance deux dés 10 sous la caractéristique corps à corps pour savoir si cette attaque réussit ou échoue.

Donovan n'avait jamais eu d'épée en main et voulu faire comme Nathanaëlle. Il prit l'épée d'une main et se plaça comme la semi-elfe. Mais le poids de l'épée et le manque d'habitude fit plier le poignet du jeune mage. L'épée tomba de ses doigts et même s'il ne risquait pas de se blesser, il recula d'un pas pour éviter de se la prendre sur le pied. Il sourit et eut un petit rire gêné. Il s'excusa et ramassa la lame. Il prit en main l'arme comme lui avait indiqué son amie. Il tenait le pommeau à deux main, écarta ses pieds pour être plus stable, plia un peu les genoux et sourit. Il était un peu plus confiant. Il ne savait pas vraiment pourquoi mais il sentait qu'il allait se blesser et qu'une écharde allait entrer dans sa peau. Il posa donc l'épée de bois, prit des gants et les enfila.

Il prit l'épée et se replaça comme il était. C'était la première fois qu'il tenait une épée pour s'en servir. Il avait conscience que c'était une épée d'entrainement mais cela restait une épée. Le seul objet tranchant qu'il avait jamais manié qui pouvait être considéré comme dangereux était le couteau de son père, il l'avait toujours sur lui et s'en servait pour tout et pour rien. Pour la cuisine autant que pour le bricolage ou pour se défendre. Il n'avait jamais eu l'occasion de s'en servir comme arme d'attaque ou de défense mais on ne sait jamais.

Il regarda l'épée et commença à prendre peur, non pas de se blesser mais de détruire l'épée. Non pas à cause de sa force qui n'était pas titanesque mais à cause de ses pouvoirs. Il avait peur que s'il attaquait et se trompait ou que s'il stressait trop, ses pouvoirs ne s'activent par réflexe et qu'il ne brûle l'épée. Il s'en voudrait énormément de détruire des objets qui ne sont pas à lui.

Il se reconcentra, regarda sa partenaire d'entrainement, prit son souffle et se prépara à attaquer la semi-elfe.

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'D10' : 5, 7

[57 > 10 Donc c'est un échec]

Nathanaëlle était heureuse d'avoir, depuis son arrivée à Sinastra, appris la patience. Cela lui permit de garder son calme tandis que Donovan changeait de position, manquant lâcher son épée, puis la posait pour mettre des gants, avant de la reprendre enfin. Elle se surpris à penser à son propre maître d'armes, et à la grimace qu'il aurait affichée en se trouvant face au mage. Lui qui aimait que les choses soient carrées, précises, aurait été frustré par un élève comme celui-ci. Mais la semi-elfe, elle, ne l'était pas. Elle se demandait seulement comment Donovan avait pu survivre jusque là avec des aptitudes de bretteur aussi ... inexistantes. À croire qu'une bonne étoile veillait sur lui. Ou peut-être était-il juste incroyablement chanceux.

Le mage se décida finalement à attaquer. Il inspira et ... abattit l'épée cinq centimètres trop à gauche, si bien que l'elfe n'eût même pas à bouger pour l'éviter. Elle se contenta de regarder la lame passer, avant de reporter son attention sur le bras qui maniait l'arme.

- ... Être concentré est une bonne chose, mais trop de concentration empêche le cerveau de se concentrer sur les sens, sur le ressenti. Ton corps doit sentir de lui-même s'il est déséquilibré, trop à droite ou trop à gauche. Réessaie, mais cette fois, fais-toi confiance.

Elle lui adressa un sourire encourageant, et reprit sa position de parade. Elle croyait en Donovan et pensait sincèrement qu'il y arriverait, si lui aussi y croyait un peu.

Donovan avança vers Nathanaëlle leva l'épée et baissa le bras quand il pensait pouvoir toucher la semi-elfe. Malheureusement, emporté par son élan, il loupa sa cible de loin. Il la loupa de si loin que Nathanaëlle ne prit même pas la peine de se décaler. Il n'avait tellement pas l'habitude d'utiliser ce genre d'arme qu'il n'avait même pas réussi à toucher sa cible. Perdant légèrement la conviction d'y arriver, il se replaça en laissant tomber ses bras. Lorsqu'il se repositionna à l'endroit auquel il se trouvait avant d'attaquer et observa son environnement mais ne trouvait pas de moyen de réussir cette exercice qui semblait si simple. Il s'arrêta à la limite entre l'ombre et la lumière sur le sol. Il remarqua que sa tutrice du jour avait reprit sa position de parade. Il remercia la guerrière pour le conseil et laissa son bras plus libre tout en tenant fermement son arme.

Même s'il allait bouger il consolida ses appuis sur ses jambes, travailla un peu la flexion de ses genoux, et il inspira. Il était partagé entre l'envie de réussir et l'envie de ne pas passer pour un nul. Donc il se dit de ne pas trop réfléchir et d'y aller.

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